Sorano va changer de statut : Les dessous d’une métamorphose en douceur
Sorano va donc changer de statut, passant ainsi d’un Etablissement public à caractère administratif (Epa), à un Etablissement à caractère industriel et commercial (Etic). Ce ne sera pas automatique, mais disons que Sorano va vers plus de liberté en matière de «politique artistique et commerciale». C’est une «vieille doléance» dit le président du Conseil d’administration (Pca) de Sorano, Alioune Badara Bèye, qui pense qu’il va falloir «rentabiliser» la structure et se montrer «plus créatif». Pour le metteur en scène Seyba Traoré, dans « Sud » il va tout simplement falloir que Sorano «travaille» davantage
Il aura suffi de deux lignes, ni plus, ni moins, pour nous apprendre que le Conseil des ministres a adopté, ce mercredi 19 avril, le projet de loi qui abroge la loi n°66-62 du 30 juin 1996, «portant création», comme on dit dans le jargon, de la Compagnie du Théâtre National Daniel Sorano. Pour faire court, disons que Sorano va tout simplement «changer de statut». Selon les explications du président du Conseil d’administration (Pca) du Théâtre, Alioune Badara Bèye, que nous avons eu au téléphone hier, jeudi 20 avril, Sorano va donc passer d’Epa (Etablissement à caractère public et administratif) à Etic (Etablissement à caractère industriel et commercial.
Il y a des avantages, dit Alioune Badara Bèye, comme il y a des inconvénients. Car avec l’Epa, qui implique la «mainmise de l’administration», l’Etat «assure la survie» de Sorano, en lui accordant une subvention, quand on sait que Sorano reçoit près de 470 millions de francs CFA tous les ans. Mais il y a tout de même quelques «limites», dit le Pca, qui laisse entendre qu’avec le système actuel, «Sorano ne peut pas prendre certaines libertés dans l’obtention des contrats, dans l’obtention des marchés, ou dans la gestion financière ».Quant à ce futur statut d’Etic, il devrait lui permettre de «s’ouvrir et d’être plus professionnel».
Idem pour le metteur en scène Seyba Traoré, qui pense aussi que Sorano aura donc la «possibilité de mieux décider de sa politique artistique et commerciale».
Mais dans le fond, dit-il, cette «vieille revendication» va surtout permettre de «régulariser une situation de fait, parce qu’en réalité les établissements publics à caractère administratif n’existent plus. C’était juste un arrangement, parce que Sorano ne peut pas générer de revenus propres, de bénéfices. Alors que les Etic sont obligés de générer des revenus, et Sorano va donc être obligé de générer des ressources propres (…) Il va falloir travailler un peu plus».
«Régulariser une situation de fait»
Alioune Badara Bèye cite d’ailleurs quelques-unes des «exigences» qui accompagneront ce nouveau statut: «Parce que si Sorano change de statut, dit-il, il va falloir se montrer plus créatif, multiplier les contacts, revoir la nature des contrats sur le plan national et international…» En un mot, dit Alioune Badara Bèye, qui insiste sur chacune de ces syllabes, «Il faut rentabiliser Sorano».
Le président du Conseil d’administration tient encore à cette nuance : ce changement de statut ne signifie «pas du tout» que l’on va vers une «privatisation» : «L’Etat aura toujours ce regard sur Sorano, ambassadeur du Sénégal au niveau culturel».
L’autre précaution à prendre, c’est que tout ne sera pas automatique, quand bien même il s’agirait d’une «vieille doléance». Car il ne faut pas oublier que «Sorano est régi par une loi», qui en a donc fait un Epa, et il en faudra donc une autre, pour en faire un Etic. Une loi qui «sera proposée à l’Assemblée nationale», puis «votée», jusqu’au «décret d’application» du président de la République.
En attendant, Sorano fonctionne donc avec cette subvention annuelle de 470 millions de francs CFA (contre 350 millions précédemment). Et si Sorano devait changer de statut, l’Etat devrait « se désengager au fur et à mesure », mais encore faudrait-il que la structure puisse « entièrement se prendre en charge ».