SENGHOR, LAMOTTE, MBAYE DIOUF DIA… Ne brisez pas nos rêves, s’il vous plait ! (Par Abdoulaye THIAM)

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«Deux dangers ne cessent de menacer le monde ; l’ordre et le désordre», Paul Valéry

Le 12 août prochain, les délégués des clubs vont choisir un président de la FSF. Le sortant, Me Augustin Senghor, devrait faire face à Louis Lamotte, Mbaye Diouf Dia et Abdoulaye Diallo. D’autres candidatures devraient être dévoilées. Jusque-là, on est dans la normalité démocratique. Toutefois, depuis quelques jours, à la place des programmes bien ficelés, on assiste à des échanges souvent en dessous de la ceinture. Ce qui ne présage rien de bon en termes de qualité des débats.

Il est souvent reproché au président Lamine Diack d’éviter le vote et de prôner des bureaux consensuels. Ses détracteurs estiment qu’une telle méthode ne répond pas aux exigences démocratiques. Certes ! Toutefois, l’ancien président de l’Association internationale des Fédérations d’athlétisme (IAAF) a toujours eu le mérite de bâtir une équipe, en fédérant les différentes forces qui veulent servir le sport et non s’en servir.

On se souvient encore de cette phrase qu’il avait lâchée lors d’un gala de l’Association nationale de la presse sportive pour mieux attirer l’attention du mouvement associatif et des autorités sur la situation du football sénégalais d’alors. «Les gars, nous avons touché le fond», avait déclaré Lamine Diack, sous une salve d’applaudissements.

Il s’en suivra la mise en place d’un Comité de normalisation du football (CNF) présidé par Mamadou Diagna Ndiaye. La suite est connue de tous. En 2009, la famille du football va porter Me Augustin Senghor à la tête de la Fédération sénégalaise de football (FSF). Elle lui renouvellera sa confiance en 2013. Deux mandats de quatre ans qui seront marqués par des avancées notoires notamment avec la mise en place du football professionnel qui emploie plus d’un millier de Sénégalais. Le football féminin prend forme et décroche une qualification historique à la CAN 2013 en Guinée Equatoriale.

Mais c’est surtout au niveau des petites catégories et de l’équipe olympique que le football sénégalais se fera remarquer. Alors que la dernière participation sénégalaise à une phase finale de CAN des juniors remonte à1995, après celle de 1993, le Sénégal se voit confier l’organisation de la CAN -20 en 2015. Les «Lionceaux» s’inclinent en finale devant le Nigeria et compostent par la même occasion leur ticket pour le Mondial en Nouvelle Zélande où ils s’arrêtent en demi-finale.

De pays hôte (qualification d’office), le Sénégal retourne cette fois chercher sa qualification pour la CAN 2017 en Zambie. Les «Lionceaux» s’offrent la Tunisie avant d’éliminer l’ogre ghanéen. A Ndola, ils réalisent un carton plein, mais s’inclinent en finale devant le pays hôte à Lusaka.

Auparavant leurs aînés de trois ans, les Espoirs, avaient réussi, eux aussi, un exploit historique en décrochant une qualification aux JO de Londres en 2012. Ils s’arrêteront en quarts de finale. L’essentiel de cette équipe conduite alors par Karim Séga Diouf, secondé par Aliou Cissé, compose la sélection A d’aujourd’hui.

Le Sénégal va encore rater de justesse une nouvelle qualification aux JO 2016 de Rio de Janeiro. Que dire de l’équipe du Beach Soccer (quatre titres en Afrique -2008, 2011, 2013 et 2016- ; et 3 quarts de finale à la coupe du monde). Sans oublier des titres obtenus aux tournois de l’Ufoa et des Jeux africains.

L’équipe nationale A, la grisaille

Toutefois, si au niveau des Petites catégories, de l’équipe nationale Espoirs et du football féminin, le bilan est acceptable, chez les A, c’est la grisaille.

Après avoir pris un bide à Bata (trois matches, trois défaites), les «Lions» ont été condamnés à l’errance suite à leur élimination de la CAN 2013 par la Côte d’Ivoire. Le stade Léopold Sédar Senghor étant suspendu, le Sénégal avait été contraint de jeter son dévolu sur la Guinée (Conakry) et le Maroc (Marrakech, puis Casablanca) pour accueillir ses adversaires. Quelle honte !

Au finish, les Lions ne seront ni en Afrique du Sud (CAN, la première en année impaire), encore moins au pays de la Samba (Mondial 2014).

En 2015, ils vont réussir à retourner sur les lieux du «crime». Mais la Guinée Equatoriale refuse de sourire aux Lions qui seront encore contraints de quitter la CAN dès le 1er tour. La pilule est amère. Pour sauver leur tête, les Fédéraux acceptent le «diktat» de l’opinion qui «impose» Aliou Cissé contre d’éventuels Sorciers Blancs qui avaient fini de montrer leurs limites.

L’ancien capitaine de l’équipe de 2002, réalise un grand chelem inédit dans le football sénégalais, dans des éliminatoires, et envoie par la même occasion, le Sénégal sur le toit de l’Afrique au niveau du classement de la Fifa. Il arrive au Gabon avec des habits d’ultra-favori du trophée. Un statut vite confirmé par les résultats. Deux matches, deux victoires, le ticket des quarts en poche, une place de 1er du groupe également assuré. Franceville commence à parler wolof. Les Sénégalais se voient déjà soulever le trophée au soir du 5 février 2017 à Libreville. Mais le rêve sera encore brisé par les Indomptables camerounais.

Le Sénégal quitte le Gabon sans la moindre défaite, mais l’élimination est amère. Surtout qu’elle est la 4ème d’affilée, la 3ème sous le magistère de Me Augustin Senghor. Ce qui apporte de l’eau au moulin de ses détracteurs, qui n’hésitent pas à remettre sur la table, l’absence d’équipementier des «Lions» depuis 2014 et surtout la gestion du dossier Romaï.

Du côté de ses souteneurs, on confie que les finances sont au vert, que le football se joue dans tout le pays et à tous les niveaux et que l’échec de l’équipe nationale A ne devrait pousser le président Senghor à ne pas se représenter.

Diack, Diagna, Souris,…

Le Sénégal compte des hommes de valeurs. Le parcours de certains d’entre eux force le respect. Ils font même la fierté de beaucoup d’entre nous. Nous pouvons citer, entre autres, les Présidents Lamine Diack, Mamadou Diagna Ndiaye ou encore El Hadji Malick Sy «Souris». Si Lamine Diack est retenu en «otage» dans une prison à ciel ouvert depuis le 3 novembre 2015, Mamadou Diagna Ndiaye, qui est considéré comme le «normateur» de notre football, ne peut pas rester les bras croisés. Sa voix est audible. Elle porte. Il est écouté et respecté. Il incarne les valeurs de l’olympisme après sa brillantissime élection en août 2015 à Kuala Lumpur. Un score brejnévien qui fait de lui le 5ème sénégalais à siéger à cette organisation, après Amadou Barry, Kéba Mbaye, Lamine Diack et Youssoupha Ndiaye.
En tant que patron du mouvement associatif sénégalais, il est de son devoir d’éteindre le feu qui couve et qui risque de consumer plus de huit ans de travail. Or, le Sénégal est proche du nirvana. Il dispose d’une équipe jeune, dynamique. Un groupe sain, dedans et dehors. Il est hors de question que des personnes mues par des appétits carnassiers et des carrières personnelles plombent notre envol.

Comme Mamadou Diagna Ndiaye, El Hadji Malick Sy «Souris» est lui aussi interpellé. Ancien international, sa structure Aldo Gentina a formé la moitié des joueurs qui ont valu au Sénégal la performance de 2002. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que l’Etat du Sénégal et la FSF l’avaient invité spécialement pour accompagner la sélection nationale au Gabon en 2017.

Mais la liste des Sapeurs Pompiers, des personnes de bonne volonté, est loin d’être exhaustive. Abdoulaye Makhtar Diop, Doudou Wade, Santhi Sène Hagne sont aussi interpellés. Sans occulter des journalistes tels, Mamadou Koumé, Abdoulaye Ndiaga Sylla, Abdoulaye Diaw, Magib Sène, Pathé Fall Dièye, Alioune Badara Diagne «Golbert».

Et Monsieur le Ministre…

Il est qualifié de «populiste» parce qu’issu du mouvement des Navetanes. Mais Matar Bâ dispose d’un génie assez rare chez les chefs des départements des Sports. Le courage de ses idées et la franchise dans la démarche.

Peu importe la «tortuosité» de certains de ses collaborateurs qu’il a trouvés sur place et a préféré garder, lui, incarne une certaine vision : faire en sorte que les disciplines puissent se sentir concernées par ce département. Mais, il ne devrait pas perdre de vue la dimension sociale du football dans cette fourchette de plus d’une quarantaine de Fédérations. Au vu donc de la dimension sociale voire sociétale du football, l’égalité entre cette discipline et les autres, fussent-elles pourvoyeuses de médailles d’or, n’est pas possible. Seule l’équité est envisageable.

Matar Bâ, sait plus que quiconque, que dans un pays comme le Sénégal, quand le football marche, tout marche. D’ailleurs, selon certaines indiscrétions, l’ancien président de la République, Abdoulaye Wade aurait beaucoup misé pour sa réélection sur la CAN 2012.

Certes, la cooptation qui, faut-il le rappeler était une source d’instabilité de la FSF, est terminée, mais l’Etat aura toujours un mot à dire dans la gestion de notre football. Ce, en tant que principal bailleur, ne serait-ce que pour l’équipe nationale A, et payeur des sélectionneurs.

Haro sur les chasseurs de prime

La fille (FSF) est devenue très belle et tout le monde voudrait désormais l’épouser. Mais tous ne remplissent pas les critères pour manager le football sénégalais. Par conséquent, il faudra savoir raison garder. Une certaine vigilance s’impose surtout face à ces «vautours» qui rodent devant les portes de la FSF. Les anciens internationaux ont certes voix au chapitre dans la conduite du football sénégalais. Mais force est de reconnaître que certains d’entre eux, sont plus nuisibles qu’utiles. La politique du «ôte-toi de là que je m’y mette» ne devrait plus prospérer dans notre pays. Celle de la pression non plus. Il appartient à tout un chacun de soutenir qui il veut. Toutefois, il n’est pas de bon aloi d’empêcher un président sortant de se représenter. La souveraineté appartient aux clubs. Seuls leurs mandataires peuvent décider à qui ils veulent confier les destinées de notre football. On ne devrait pas perdre de vue que les anciens internationaux disposent d’une association dont le président occupe la 6ème vice-présidence de la FSF et de droit. C’est un signe de reconnaissance aux services rendus. Les autres devraient plutôt retourner à la base pour rendre au football ce que le football leur a donné. Gorgui Sy Dieng (Basketball) encore en activité vient de donner l’exemple à suivre.

Génération 2002 et alors ?

Tous les observateurs ont pu constater, à travers les sorties dans les médias, qu’il y a une certaine jalousie entre les différents acteurs de la Génération dite de 2002. Les clans d’alors quand ils étaient joueurs refont surface. La seule différence, c’est que certains ont réussi leur reconversion (consultances, entraîneurs), d’autres sont cooptés dans les instances continentales (CAF) et sans compter ceux qui cherchent une place au soleil. Mais convenez-en avec nous, tous ne peuvent pas intégrer la FSF, les équipes nationales. Pis, qu’ont-ils de plus que les Générations de Tunis 65, d’Asmara 68, de Caire 86, de Nigeria 2000 ? Le football sénégalais n’est pas né en 2002 et il ne s’arrêtera pas en 2017. Des générations passent, d’autres arrivent. Il est éternel.

Abdoulaye THIAM

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