RSF a recensé 171 arrestations de journalistes en Afrique en 2019

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 L’organisation de défense de la liberté de la presse Reporters sans frontières (RSF) déclare avoir dénombré 171 arrestations de journalistes en Afrique, des atteintes à la libre expression des médias quelquefois basées sur des « textes fourre-tout ».
« En 2019, RSF a dénombré 171 arrestations arbitraires de journalistes en Afrique subsaharienne », écrit l’organisation à l’occasion de la publication de son classement 2020 sur la liberté de la presse dans le monde.
Concernant les motifs invoqués par les Etats pour restreindre la liberté de la presse, elle affirme avoir constaté que « de nouveaux textes fourre-tout » sont souvent invoqués « au nom de la lutte contre la désinformation ».
Les autorités politiques et judiciaires se basent sur ces « nouveaux textes », chaque fois que « le droit local a déjà consacré la décriminalisation des délits de presse », selon Reporters sans frontières.
C’est pourquoi, explique l’organisation, « les journalistes sont tour à tour accusés d’être des terroristes, des espions, des fraudeurs ou encore des cybercriminels dans le seul but d’être réduits au silence ».
C’est le cas au Bénin, où le journaliste d’investigation Ignace Sossou a été condamné, sur la base d’un code du numérique récemment adopté, à une peine de prison de dix-huit mois ferme pour « harcèlement au moyen de communications électroniques ».
Sossou « avait rédigé des tweets reprenant mot pour mot des propos d’intérêt public’’, fait valoir RSF, soutenant qu’ »il n’aurait jamais dû être condamné pour des faits relevant sans aucune ambiguïté du journalisme’’.
Au Tchad, pays classé 123e (avec la perte d’une place par rapport à son rang en 2019), les charges visant le directeur de publication Martin Inoua Doulguet ont été requalifiées en ‘’cyber-harcèlement’’ alors qu’il était initialement poursuivi pour ‘’diffamation’’.
Celles visant le journaliste d’investigation tanzanien Erick Kabendera ont été modifiées à trois reprises dans le seul but de le maintenir en détention, selon l’organisation de défense de la liberté de la presse et de protection des sources des journalistes.
‘’Toujours poursuivi mais désormais libre, il (Kabendera) aura passé sept mois derrière les barreaux’’, ajoute RSF.
La ‘’détention arbitraire’’ de ce journaliste explique en partie ‘’la chute vertigineuse’’ de la Tanzanie dans le classement. Ce pays est 124e, avec une perte de six places sur le rang qu’il occupait en 2019.
De 2016 à 2020, la Tanzanie a perdu 57 places au classement RSF. ‘’Aucun pays au monde n’a vu sa situation se dégrader aussi vite durant ces dernières années’’, souligne l’organisation.
De ‘’nouvelles menaces’’
A l’inverse, le Soudan fait beaucoup de progrès en prenant la 159e place, avançant de 16 places sur son rang en 2019.
C’est parce que le pays ‘’connaît une forte progression’’ en matière de respect de la liberté de la presse ‘’depuis la chute d’Omar el-Béchir en avril 2019’’.
‘’Le niveau des attaques directes, des arrestations de journalistes et de la censure de journaux a fortement diminué, mais la presse, notamment en ligne, est encore sous surveillance’’, constate RSF.
Reporters sans frontières relève de ‘’nouvelles menaces’’ sur l’exercice du métier de journaliste. La ‘’cybercensure’’, l’une d’elles, ‘’continue à gagner du terrain et constitue désormais une arme particulièrement létale pour le journalisme en Afrique’’.
Près de la moitié des pays d’Afrique subsaharienne évalués y recourent depuis 2015, dont une dizaine de pays pour la seule année 2019. On compte parmi ces pays la République démocratique du Congo, la Mauritanie, le Malawi ou encore l’Ethiopie.
‘’Le Tchad s’octroie un triste record continental, avec une coupure des réseaux sociaux du pays pendant quatre cent soixante-dix jours consécutifs’’, privant ‘’les journalistes et les citoyens d’un média devenu incontournable‘’.
Toutes ces formes de violation de la liberté de la presse font croire à RSF que ‘’trente ans après la libéralisation du secteur’’ des médias, les médias ‘’peinent encore à s’affranchir des diktats politiques et économiques’’.
‘’Dans la quasi-totalité des pays africains, les médias publics sont loin d’avoir achevé leur mue. Ils restent sous l’emprise du pouvoir, se contentant généralement de relayer la communication du gouvernement, sans refléter la diversité des opinions de leur société’’, affirme l’organisation.
Elle estime que ‘’l’avènement d’une presse indépendante de qualité ne pourra se faire sans choix politique fort’’.
APS

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