RDC: Entre Silence et Responsabilité, Quel Choix pour l’Afrique ?

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La République Démocratique du Congo est en proie à un conflit persistant qui interpelle la conscience collective. L’Afrique hésite, oscillant entre impuissance et espoir, tandis que l’Occident observe avec un regard détaché. Depuis plus de 20 ans, ce conflit est l’un des plus meurtriers de notre époque. Des millions de morts, des villages anéantis, des générations sacrifiées.
Présente avec la MONUSCO, sa mission de maintien de la paix, l’ONU s’efforce de contribuer à la stabilisation de la RDC. Toutefois, malgré les ressources mobilisées et les efforts déployés, la complexité du conflit et la multiplicité des acteurs impliqués nécessitent une approche plus coordonnée, fondée sur une coopération accrue entre les instances internationales et les États africains.
Mais une question demeure : qui bénéficie réellement de cette guerre ? Pourquoi la RDC reste-t-elle enfermée dans un cycle d’instabilité persistante ? L’histoire retiendra que, malgré la présence des Nations Unies, la RDC continue de vivre une instabilité chronique marquée par des violences répétées, des déplacements massifs et une précarité inacceptable au regard de son immense potentiel économique et naturel. Cette réalité soulève une interrogation fondamentale : la paix en RDC est-elle véritablement recherchée ou certains intérêts trouvent-ils dans son instabilité une opportunité stratégique ?
Les dynamiques de ce conflit ne se limitent pas à un problème interne congolais. Elles concernent l’ensemble du continent africain et même au-delà. Elles révèlent une Afrique qui peine encore à affirmer son autorité sur ses propres affaires sécuritaires. Pour que le continent soit respecté sur la scène internationale, il doit prouver sa capacité à gérer et résoudre ses crises avec autonomie et détermination. Aucun État africain ne peut se permettre de croire que ce conflit est éloigné de ses frontières et ne le concerne pas. L’instabilité en RDC a des répercussions sur toute l’Afrique, affectant la sécurité régionale, l’économie et la crédibilité diplomatique du continent.
C’est dans ce contexte que surgit un espoir renouvelé. Une impulsion, discrète mais significative, qui brise le mur du silence. Le Président Bassirou Diomaye Faye a récemment pris l’initiative d’interpeller directement les deux figures centrales du conflit, Félix Tshisekedi et Paul Kagame. Ce geste, bien que diplomatique, revêt une signification profonde. Il symbolise une prise de position audacieuse et un appel à l’unité africaine pour s’attaquer aux défis sécuritaires du continent.
Ce n’est pas qu’un simple appel, c’est un signal fort. Un message clair au reste du monde : l’Afrique ne peut plus se contenter d’être spectatrice de son propre destin. Ce contact direct ne se veut pas une simple médiation symbolique, mais plutôt une invitation à une action commune et déterminée.
D’un geste, le Président de la République Bassirou Diomaye Faye s’écarte de la diplomatie de l’attentisme, cette habitude trop ancrée de s’en remettre aux grandes puissances ou aux institutions internationales pour arbitrer les crises africaines. Il rappelle un principe fondamental : tant que l’Afrique ne parlera pas d’une seule voix, d’autres imposeront leur vision pour elle.
Mais un appel, aussi significatif soit-il, ne suffit pas à changer le cours de l’histoire. C’est un premier pas, un point d’ancrage sur la voie d’une Afrique qui aspire à être maître de son destin. Ce qu’il faut désormais, c’est un engagement collectif, une action concertée qui transforme cette impulsion en un élan continental vers une paix véritable et durable.
L’heure est venue de bâtir une architecture solide pour la paix et la sécurité en Afrique, fondée sur trois piliers fondamentaux : la prévention, la médiation proactive et l’action coordonnée.
D’abord, la prévention. Il est crucial que les États africains ne se limitent pas à réagir aux crises une fois qu’elles éclatent, mais qu’ils mettent en place des stratégies d’anticipation efficaces. La RDC est un exemple d’échec préventif. Pourquoi attendre que la situation devienne incontrôlable avant d’agir ? L’Afrique doit renforcer ses mécanismes de veille stratégique, identifier les facteurs de risque et intervenir en amont pour éviter l’escalade.
Ensuite, la médiation proactive. L’Union Africaine et les organisations régionales doivent évoluer vers une diplomatie plus résolue et structurée. Les discussions ne doivent pas être de simples exercices de communication, mais aboutir à des engagements concrets assortis de mécanismes de suivi rigoureux. La crédibilité de la diplomatie africaine dépend de sa capacité à imposer des accords respectés et applicables.
L’Afrique ne peut plus se reposer uniquement sur la MONUSCO, dont les limites sont de plus en plus évidentes. Si cette mission d’interposition avait eu un véritable effet dissuasif, la situation en RDC aurait évolué positivement depuis longtemps. Il est temps que les États africains prennent leurs responsabilités et mettent en place une force régionale d’intervention rapide, dotée d’un mandat clair, capable de sécuriser les zones les plus sensibles, de démanteler les groupes armés et de restaurer l’autorité de l’État congolais sur l’ensemble de son territoire.
Il est impossible de continuer à regarder la RDC souffrir. Il faut se lever et dire ASSEZ. Il faut que cela cesse. Il est impératif que l’Afrique, dans son ensemble, prenne la mesure de cette crise et agisse immédiatement.
Au-delà des actions militaires et diplomatiques, une réalité fondamentale s’impose : la guerre en RDC est avant tout une guerre économique. Derrière chaque affrontement, chaque groupe armé, se cachent des réseaux financiers, des intérêts géopolitiques et une économie souterraine qui prospère sur l’instabilité. Tant que l’exploitation illégale des ressources congolaises alimentera le conflit, aucune solution durable ne pourra être trouvée.
L’Afrique doit donc agir avec fermeté pour couper les circuits de financement de la guerre en RDC. Cela passe par :
• Un embargo strict sur les minerais de sang, avec des sanctions contre les acteurs complices de leur exploitation illégale.
• Une transparence accrue dans la chaîne d’approvisionnement des matières premières africaines, afin que les ressources du continent bénéficient aux Africains eux-mêmes.
• Une coopération économique renforcée avec la RDC, pour favoriser une exploitation légale et durable de ses richesses sous le contrôle de son gouvernement et au profit de ses citoyens.
L’histoire nous jugera. Serons-nous la génération qui a laissé la RDC sombrer, ou serons-nous celle qui a enfin assumé ses responsabilités ?
Hady TRAORE
Consultant en Gestion stratégique et Politique Publique-Canada

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