Pourquoi la dissolution de l’Assemblée nationale devrait être différée (Charles Émile Abdou Ciss, Ex.directeur de la solde)

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La dissolution de l’Assemblée nationale comporte un risque majeur pour les finances publiques, une inertie totale des autorisations budgétaires. En effet, quand bien même, elle permettrait à la majorité d’asseoir sa main mise sur l’Assemblée nationale, elle n’en comporte pas moins des conséquences juridiques et budgétaires regrettables.

I- Le premier risque est lié au temps exigible pour l’organisation des élections législatives c’est à dire au minimum trois mois comportant les étapes suivantes : prise du décret portant convocation du corps électoral, organisation du parrainage, déroulement de la campagne, tenue du scrutin et publication des résultats. Par conséquent au regard du caractère incompressible des délais : la nouvelle Assemblée ne peut être installée avant fin janvier 2025.
Or, l’examen du budget 2025 devrait intervenir à partir du 15 octobre : jour de l’ouverture de la seconde session ordinaire de l’année consacrée presqu’ exclusivement à l’examen du projet de loi de finances de l’année.

Par ailleurs, cette session devrait permettre d’examiner et de soumettre au vote du Parlement les projets de lois de règlements des gestions budgétaires 2022 et 2023. En principe, en vertu du mécanisme du chainage budgétaire vertueux, le Projet de loi de règlement de l’année N-1 (2023) doit être examiné avant le Projet de loi de finances de l’année N+1 (2025).
Auparavant,
les autorisations budgétaires de la loi de finances accordées au Gouvernement précédent pouvaient être maintenues à périmètre constant. Mais tel n’est pas le cas, puisque les ministères sont passés de 34 à 25. Il s’y ajoute également que leur dénomination a sensiblement changé ainsi que de nombreux services chargés de l’exécution du budget, sans oublier les responsables desdits services. Il a également été relevé un niveau de recouvrement élevé des recettes fiscales et non fiscales.
Tous ces facteurs probants concourent à l’urgence d’élaborer une loi de finances rectificative permettant au Gouvernement, conformément aux dispositions de la nouvelle Loi organique relative aux lois de Finances, de disposer d’une autorisation budgétaire couvrant les actes de dépenses initiés par ses membres (ministres, directeurs généraux, etc )

II- Le second risque, non moins majeur en cas de dissolution, c’est que toutes ces opérations budgétaires pŕésentes ou à venir (Budget 2024, Budget 2025) ne seraient pas légalement couvertes et le Sénégal plongerait dans une obscurité budgétaire inédite puisque l’Exécutif, en vertu du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs ne peut s’autoriser à percevoir des impôts et à dépenser.
En effet, la Constitution réserve cette compétence exclusivement au Parlement. La seule exception prévue est liée au retard de dépôt du projet de Loi de finances par le Gouvernement. En l’espèce, il suppose que l’Assemblée existe et puisse permettre au Gouvernement, selon les cas, de reconduire les services votés. Or, ici, nous sommes en face d’un risque de vide législatif ce qu’aucun texte ne prévoit.

III- En définitive, compte tenu des risques de dégradation qu’encourt notre profil démocratique déjà rudement malmené durant la fin de régime du Président Macky Sall, il faudrait renouer les fils du dialogue qui avait permis de contribuer à la tenue du scrutin avant la fin du mandat du Président sortant. L’objectif serait de mettre fin à la crise actuelle par :

  • ⁠la tenue de la Déclaration de politique générale;
  • ⁠le retrait de la motion de censure;
  • ⁠ l’organisation du débat d’orientation budgétaire;
  • ⁠l’examen et le vote des projets de lois de finances rectificative 2024 et la loi de finances 2025.
     » Lorsque nous cesserons de compter, c’est la peine des hommes qu’on oubliera ».

Charles Emile Abdou CISS

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