MACKY, A L’EPREUVE DU SEPTENNAT

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Et si Macky Sall décidait de revenir sur son engagement et d’aller jusqu’au bout de son mandat  devant, en principe, se terminer en 2019 ? Voilà une question qui n’est pas à écarter du champ des possibles, à  l’heure où la question de la réduction du mandat présidentiel semble passer par tous les états. Si « wax waxeet » il y avait, à quel scénario politique Macky Sall pourrait-il s’attendre, en vérité? Devrait-il prolonger le mandat des députés qui s’achève en 2017 ou non ? Pourrait-on aller vers un couplage des élections  législatives et de la présidentielle en 2019 ou non ?

A contrario, en cas de respect du calendrier électoral et d’organisation des Législatives en 2017, que risquerait Macky si l’opposition gagnait les élections ? Une cohabitation est-elle envisageable dans le schéma politique sénégalais ? Hypothèse d’école ou prospective, Sud quotidien se permet d’analyser la donne par le biais de spécialistes en la matière, en l’occurrence le Pr Babacar Guèye, expert constitutionnaliste, le journaliste enseignant Ibrahima Bakhoum,  voire l’ancien ministre libéral Me Abdoulaye Babou, par ailleurs ex-président de la Commission des lois à l’Assemblée nationale.

PR BABACAR GUEYE, SPECIALISTE DU DROIT CONSTITUTIONNEL : «Je ne pense pas qu’il y ait possibilité de prolonger encore le mandat des députés…»
Je ne pense pas qu’il y ait possibilité de prolonger de 2 années encore le mandat des députés au risque de violer une disposition constitutionnelle. Il faudrait, à la limite, modifier la Constitution pour pouvoir le prolonger de 05 à 07 ans. Cependant, je ne sais pas quelle sera même la pertinence de cette modification dans la mesure où cette réforme ne sera pas conforme à la Constitution qui prévoit la durée du mandat des députés à 5 ans.
 Vous vous rendez compte de cet écart de 05 à 07 ans ? C’est énorme ! On peut comprendre que des élections soient décalées d’une semaine, de deux mois, à la limite parce qu’il y a des difficultés, quelque chose de grave comme du temps de Wade lorsqu’il est arrivé, à cause des inondations, de repousser les élections de quelques semaines mais deux années, cela me parait excessif.
Maintenant, si le Président reste 7 ans, parce que la modification de la Constitution n’est pas encore intervenue, on est dans la logique du septennat. Et, si entretemps, en 2017, il y a élections législatives et si le président perd la majorité, il sera obligé de cohabiter avec la nouvelle majorité. C’est pourquoi, il devait respecter sa parole et organiser les élections législatives et la présidentielle en 2017. Ce schéma-là me parait plus logique. Car, cela va permettre l’accourcissement du mandat présidentiel à 5 ans mais aussi le couplage de l’élection présidentielle et l’élection législative. Cela me parait plus plausible que de remonter le mandat des députés de deux ans.
IBRAHIMA BAKHOUM, JOURNALISTE FORMATEUR ET ANALYSTE POLITIQUE : «Tant que la majorité parlementaire n’est pas favorable au Président…, c’est la confusion»
S’il y a élections législatives en 2017 et que le mandat présidentiel arrive à expiration en 2019, si le pouvoir perd sa majorité parlementaire, on se retrouve dans une situation de cohabitation. Et, ça va être une première au Sénégal mais c’est la réalité politique qui s’impose. Il n’est pas dit, parce que ça n’a jamais eu au Sénégal, qu’il ne peut y avoir lieu. Maintenant, comment ça va être géré dans un régime présidentiel très fort comme le Sénégal, où on considère que c’est le président de la République qui définit la politique de la nation, qui nomme aux fonctions civiles et militaires.
Tant que la majorité parlementaire n’est pas favorable au président de la République dans un régime non parlementaire, c’est la confusion. Parce qu’à cause de cette minorité parlementaire, le Président peut se confronter à un sérieux problème pour valider sa politique et décider à la place de l’Assemblée nationale. Le jour où on aura une Assemblée nationale défavorable au président de la République, il n’y aura jamais de stabilité dans le gouvernement. On assistera par exemple à de nombreuses introductions de motions de censure à chaque fois que l’Assemblée nationale conteste la nomination d’un Premier ministre pour le faire tomber facilement avec son gouvernement.
Il sera donc difficile pour le Président de conserver sa majorité car il ne pourra pas dissoudre l’Assemblée nationale. Si on arrive à une élection en 2017 et que le camp du Président est minoritaire à l’hémicycle, il ne pourra pas dissoudre l’Assemblée nationale mais rien ne lui interdit de ne pas nommer un Premier ministre. Maintenant, si c’était un régime parlementaire, il n’y aura pas de problème. Car, dans ce cas, le Président est obligé de travailler avec un Premier ministre nommé par la majorité opposante de l’Assemblée nationale. Toutefois, le régime présidentiel fort tel qu’il est aujourd’hui ne peut pas fonctionner dans une démocratie avancée.
ME ABDOULAYE BABOU, ANCIEN MINISTRE ET EX-PRESIDENT LIBERAL DE LA COMMISSION DES LOIS, A L’ASSEMBLEE : «Le Président a des pouvoirs… qui lui permettent de gouverner sans l’appui d’une majorité parlementaire»
Je peux dire tout de suite que je ne crois pas à cette hypothèse. Je connais l’homme pour l’avoir côtoyé alors qu’il était chef du gouvernement dans lequel j’ai été ministre, puis président de l’Assemblée nationale. Ce vécu me permet de dire donc que l’homme ne reviendra pas sur son engagement de réduire la durée de son mandat de 7 à 5 ans…Je n’envisage donc pas, une seule fois, de voir Macky Sall revenir sur cet engagement.
Quid d’une cohabitation en 2017? Je puis vous dire que cette hypothèse n’est pas dans ses calculs (Macky Sall-Ndlr). La France a connu la cohabitation sous la présidence de Jacques Chirac, le gouvernement de l’opposition était dirigé par Lionel Jospin. Mais, au Sénégal, constitutionnellement, le Président a des pouvoirs extrêmement importants qui lui permettent de gouverner sans l’appui d’une majorité parlementaire. Il a des pouvoirs propres qui font que notre régime est plus présidentialiste que parlementaire. Je ne vois dans aucun cas de figure ici, au Sénégal, un président de la République être gêné par une opposition à l’Assemblée nationale. Et d’ailleurs, je n’envisage pas, personnellement, une cohabitation entre l’opposition et le pouvoir. Je pense que cela est plus une hypothèse d’école que quelque chose qui soit fondée sur la réalité.

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