L’arrogance française…une fois de plus, une fois de trop ! (Abdoulaye SARR)
Qui ne se souvient de la diatribe névrotique de Nicolas Sarkozy refaisant l’Histoire de l’Afrique ou disons le autrement : défaisant l’Histoire de l’Afrique dans un discours révisionniste, scandaleusement déplacé et foncièrement discourtois ! Dans la même veine, on peut également évoquer toutes les « leçons » civilisatrices des racistes les plus patentés que compte la France. L’évocation de leurs noms m’écorcherait la langue, donc je m’en garde volontiers.
A présent, c’est le jeune Olivier Faure – devenu accidentellement 1er Secrétaire d’un parti en déshérence qu’il dirige cahin-caha avec l’infortune que l’on sait marquée de déroutes électorales de scrutin en scrutin – qui vient donner des leçons de démocratie au Sénégal, avec comme seul légitimité la prétention du colonialiste amnésique. Le Sénégal n’est pas un protectorat français !
Pour ceux que sa sortie déplacée a échappé, je rappelle que ce jeune capitaine inexpérimenté du désormais fantomatique parti socialiste français qu’il achève de faire sombrer tel le Titanic, par des choix stratégiques désastreux et des alliances contre nature suicidaires, s’est autorisé une fracassante ingérence dans les affaires intérieures d’un pays ami, en tweetant dans la soirée du samedi 25 juin 2022, sans doute après un verre de trop, cette attaque contre le Sénégal : une « liberté de manifester entravée »; une « justice instrumentalisée », pour assurer que … « la démocratie sénégalaise est piétinée ». L’a-t-on jamais entendu s’indigner, lui Olivier Faure, lorsque des manifestations interdites en France donnent lieu à une intervention des forces de l’ordre pour y mettre un terme ? A-t-il pris une seule fois le risque de commenter, en France, une décision de justice ? Pourquoi il se permet de jeter l’opprobre sur la justice sénégalaise, avant même que celle-ci ne se prononce sur le cas des manifestants arrêtés pour une cause dont l’appréciation relevait de l’office du Juge ? A quel titre se permet-il de disqualifier la Justice sénégalaise et de discréditer sa démocratie ? Une telle incursion étrangère, dans les affaires intérieures d’un pays libre, est grave !
1. Quel démocrate est Olivier Faure ?
Monsieur Olivier Faure, un petit politicien novice et assoiffé de reconnaissance, ambitieux à souhait et rudement pressé, chef d’un parti qu’il a rendu exsangue par ses choix calamiteux, s’il est sincèrement socialiste, devrait avoir honte de sa prise de position outrancièrement colonialiste.
Parfois, il est bon de tourner sa langue sept fois dans la bouche, avant de parler. C’est ce qu’enseigne la sagesse populaire. En matière de tweets, il en est de même : il est sage d’en assurer la maturation pour s’affranchir du ridicule et du déshonneur. Pour rappel à Monsieur Faure, un certain Donald Trump, dont l’histoire ne retient que les frasques, en a fait les frais bien souvent et bien avant lui.
Ce type de dérive, qui s’ajoute à bien d’autres, de personnalités politiques étrangères, traduisant une condescendance ou un paternalisme béat, si ce n’est du mépris, vis à vis de l’Afrique, ne procède curieusement que d’acteurs publics français ! Est-ce à dire que la France reste nostalgique de son sombre passé colonial; qu’elle a du mal à se défaire de cette page peu glorieuse de son histoire ?
Qu’elle le veuille ou non, ce passé est révolu et ses anciennes colonies sont, depuis, des Etats indépendants et souverains qui sont désormais les maîtres de leur destin et donc libres des règles qu’ils se choisissent et par conséquent de leur système institutionnel et démocratique, sans ingérence, sans influence, sans diktat.
N’en déplaise à Olivier Faure et à Jean-Luc Mélenchon qui lui aussi est venu mêler sa voix de donneur de leçons à celle du premier !
2. Quel démocrate est Jean-Luc Mélenchon
Que l’irruption de Mélenchon dans ce concert de bonnes âmes soit dictée par son désir irrépressible de capter la lumière, cela ne surprend pas au regard de sa nature intrinsèque, néanmoins la charge est brutale et irresponsable pour souffrir la moindre excuse, de surcroît venant d’un vieux routier de la politique.
Messieurs Faure et Mélenchon doivent des excuses à l’État du Sénégal et aux sénégalais, pour leur faute de jugement qui est un affront qui heurte tout un peuple. Leur maladresse est malencontreuse et inamicale.
Jean-Luc Mélenchon, quelles que soient au demeurant les qualités qu’on pourrait lui trouver, est mal venu pour donner des leçons de démocratie. Il n’a guère démontré de telles vertus, ni dans son parti, la France insoumise, ni dans ses partenariats politiques, ni dans son parcours pour la conquête du pouvoir.
Pour cause – et en s’en tenant uniquement aux évènements les plus récents – Mélenchon, candidat à l’élection présidentielle française 2022 a refusé de participer à une primaire de gauche qui aurait pu donner une solide dynamique et d’énormes moyens logistiques et financiers à un candidat commun pour l’emporter face au président sortant; ce refus tout simplement parce qu’il n’était pas le favori. La favorite ayant été Christine Taubira, qui finalement remportera le vote des militants, sans qu’aucun des candidats autoproclamés ne daigne se ranger derrière elle, l’obligeant à finalement jeter l’éponge. Est-ce là l’étoffe d’un démocrate ? Mélenchon, que François Hollande qualifie de « boulet de la gauche » en a déconcerté plus d’un, dans sa famille politique, en affichant et en affirmant un soutien clair et sans équivoque à des dictateurs ou des autocrates. Est-ce l’attitude d’un démocrate ? Il s’est illustré par un autoritarisme destructeur au sein de sa coalition avec les partis de gauche dans ce qui sera désigné sous l’acronyme Nupes, mais qui n’est autre qu’un mariage de dupes dont Olivier Faure est le principal cocu. Nul doute que l’union de façade ne tardera pas à voler en éclats. Le partage des circonscriptions, avec ses partenaires de gauche, a été l’occasion pour Mélenchon de réserver la part du lion à son parti, laissant aux autres des clopinettes. Est-ce bien démocratique, même si Olivier Faure n’a pas bronché, du moment qu’une circonscription facile lui a été attribuée ? A cet égard, Emmanuel Macron dira de Jean-Luc Mélenchon que « c’est un sauvage, en ce qu’il propose une union à des partenaires mais en leur laissant juste de quoi survivre ». Ce partage sera de même l’occasion pour Monsieur Mélenchon de réserver à son gendre une circonscription sur mesure, ce qui lui vaudra d’être accusé de népotisme.
3. Que faut-il attendre de ces deux donneurs de leçons ?
Messieurs Faure et Mélenchon, plutôt que de prêcher une morale démocratique dans le désert, feraient mieux de surveiller leurs arrières, au lieu de s’immiscer dans les affaires intérieures d’une démocratie solidement installée, car leur alliance de circonstance qui n’a aucun fondement démocratique, va se disloquer très vite. Ainsi, il pourra être dit qu’ils auraient mieux fait de s’appliquer leurs leçons de démocratie.
4. Faut-il s’exalter de la démocratie sénégalaise ?
Je ne saurais terminer, sans me réjouir de la sage décision prise par l’opposition de revenir sur sa volonté affirmée de manifester, sans autorisation. C’est un retournement responsable qui ne fait que renforcer la démocratie sénégalaise, qui en sort grandie. Dans un État de Droit, les règles s’imposent à tous les citoyens, sous le contrôle de l’organe régulateur que constitue le pouvoir judiciaire.
Grâce au mécanisme de l’équilibre des trois pouvoirs que sont l’exécutif, le législatif et le judiciaire, tout abus est sanctionné et tout arbitraire est impossible. Il appartient aux leaders d’opinion : syndicalistes, journalistes, politiciens, chefs spirituels, responsables d’associations – pour une paix solide et durable – de veiller à la pérennisation de cet équilibre, en dépassionnant le débat public. Pour cela, il faut se souvenir que la jeunesse a besoin d’un cadre apaisé, pour la stabilité d’un pays. Il faut aussi se souvenir que l’opposition d’aujourd’hui est la gouvernance de demain. C’est la logique de l’alternance démocratique. Aussi, instrumentaliser ou haranguer sa jeunesse pour déstabiliser un pouvoir en place, c’est s’inscrire dans une posture de ne pas exercer sereinement le pouvoir ainsi cueilli et c’est surtout instaurer de manière durable et incontrôlable le chaos et la violence. C’est à éviter. Le pouvoir se gagne par les urnes et non dans la rue.
Le Sénégal n’a pas de leçon de démocratie à recevoir, ni d’Olivier Faure, ni de Jean-Luc Mélenchon et sa tradition de terre d’accueil et de concorde mérite d’être préservée. C’est l’affaire de tous ses ressortissants, quels qu’ils soient et où qu’ils soient. Il faut que chaque sénégalais y veille et y contribue, pour le plus grand bien de tous !
Abdoulaye SARR
Juriste, Tours, France
Cher ami Sarr
C’est une très bonne analyse et très bien écrit.
Je te suggère de postuler sur RMC, « les grandes gueules » débat quotidien à la radio. Autrement ce sera aussi une bonne occupation intéressante pour ta future retraite.
Quoique, pourquoi pas être consultant ou ministre au Sénégal ?
Bravo !Bravo!
Elise