Eventualité d’un gouvernement d’union nationale: Les analystes rament à contre courant

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L’après Covid-19, au Sénégal, supputé par certains analystes politiques (Momar Diongue et autre Assane Samb) comme pouvant être l’occasion pour la classe politique de se retrouver autour d’un bloc et de favoriser un gouvernement d’union nationale, ne fait pas l’unanimité au sein de leurs pairs. A l’instar du Docteur Atab Badji, analyste politique, et Ibrahima Bakhoum, journaliste formateur et analyste politique qui semblent montrer un certain scepticisme, quant à la question d’un gouvernement d’union nationale. Qu’il soit en contexte de dialogue national ou d’après-Covid-19 !

DOCTEUR ATAB BADJI, ANALYSTE POLITIQUE «Pour certains partis politiques, ce serait une erreur»

«Moi, je me méfie de ce gouvernement d’union nationale. Parce que souvent, il y a de l’arnaque derrière. Ce que j’appelle arnaque, c’est en fait un regroupement d’hommes politiques qui sont plus mus par leurs intérêts propres que par les grandes questions de l’- heure. Je crois ce serait dommage, parce qu’en fait le choix de la démocratie, ce n’est pas forcément l’unanimisme. La démocratie, c’est la confrontation permanente et dynamique des idées. Pour une question précise, la richesse de la démocratie, c’est que les idées puissent être plurielles. Parce que la richesse, c’est dans la diversité. Et ce serait dommage qu’il y ait un gouvernement d’union nationale où l’opposition tout comme le pouvoir vont se réunir autour d’une table et au nom d’une certaine théorie comme une solidarité gouvernementale. Ce qui fera que le peuple va être laissé à luimême. Je crois que même politiquement pour certains partis, ce serait une erreur. Parce que ce phénomène de gouvernement d’union nationale pourrait être pour certains une finalité.

Pour le régime, oui, ça peut arranger les choses. Et pour les petits partis sans un très grand potentiel, ça peut être une occasion d’exister un peu. Mais dans certains partis de l’opposition ambitieuse, vu plusieurs facteurs et certains enjeux, être dans un gouvernement d’union nationale peut être une erreur. Parce que tout le monde n’a pas le don qu’avait Abdoulaye Wade qui avait la possibilité d’entrer dans un gouvernement et immédiatement après de changer de discours, à chaque fois que les élections étaient là, de l’adapter à ce contexte, de passer par une certaine frustration pour changer la donne. Souvent, ce jeu peut être dangereux pour certains. Je crois qu’un gouvernement d’union nationale attrait ceux-là qui y pensent à un moment donné. Leurs intérêts convergent et ils peuvent être dans cette dynamique. Et pour d’autres qui se disent aussi dans l’opposition, c’est plus sûr vu que la réalité du camp gouvernemental est qu’il est confronté à un hypothétique problème de candidat. On peut se dire oui, voilà on va aller en gouvernement d’union nationale sous prétexte d’aller s’aligner secondairement comme un candidat alternatif. Donc, ça peut arranger une certaine partie de l’opposition. Mais pour l’autre partie, je pense qu’il vaut mieux ne pas partir»

IBRAHIMA BAKHOUM, JOURNALISTE ET ANALYSTE POLITIQUE «Je dirais plutôt que le pouvoir pourrait élargir une base politique»

« Parler de gouvernement d’union nationale me semble trop fort dans le contexte sénégalais que nous connaissons depuis quelques années. Parler d’un gouvernement d’union nationale, ça pose en effet problème. Je dirais plutôt que le pouvoir pourrait élargir une base politique. Elargir la base politique veut dire tout simplement aller voir d’autres personnes ailleurs. Mais il se trouve qu’il y a certaines de ces personnes qui ont déjà été plus ou moins écartées dans la position oppositionnelle, je dis bien la position oppositionnelle…

Il y a d’autres également avec lesquels on n’a pas encore réglé le contentieux politico-judiciaire, je dis bien contentieux politico-judiciaire. Donc, pour le cas de ces personnes dont on n’a pas encore réglé la situation, évidemment les laisser de côté pour une raison ou d’une autre alors qu’ils sont très représentatifs en termes d’image ou de poids électoral, ça peut poser problème dans le cadre d’un gouvernement dit d’union nationale…Ces personnes-là, vous ne pouvez pas les mettre de côté et ensuite prétendre faire un gouvernement d’union nationale.

L’union nationale ne peut pas se concevoir sans des gens qui ont eu de bons scores électoraux et qui apportent quelque chose quand même dans la communication publique, au plan politique. Si vous voulez écarter ces gens-là, vous n’êtes plus en train de faire un gouvernement d’union nationale, vous êtes en train de faire un gouvernement d’une base politique élargie».

 

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