Déclaration de patrimoine: les deniers publics à la merci des régies financières (Par Cheikhou Oumar Sy)
La récente déclaration du patrimoine du Président Bassirou Diomaye Diakar Faye est à saluer. Elle s’inscrit de plus en plus dans une tradition de transparence dans la gestion de l’Etat et donne une meilleure appréciation aux populations des avoirs de celui à qui ils ont confié les destinées du pays.
Cette déclaration renseigne que le Président de la République, encore en début de carrière (inspecteur des finances publiques), a pu accumuler plus de 375 millions de FCFA en biens matériels et financiers dont une bonne partie grâce aux avantages tirés des derniers publics. Il est clairement stipulé dans sa déclaration que son terrain lui a été attribué par le syndicat des impôts et domaines dans un site dont le métré carré couterait aujourd’hui entre 500.000 FCFA à 750.000 FCFA. Il est même de notoriété publique que le syndicat des impôts a pu mettre la main sur les meilleurs espaces fonciers de Dakar.
Il est a remarqué qu’au moment où le scandale des terrains de Mbour 4 occupe l’espace public, c’est le silence total du côté de l’ancienne piste dont le carnage foncier est sans précédent.
La déclaration fait état des autres biens du Président mais elle omet sciemment d’informer les sénégalais sur le nombre de fois que l’inspecteur des finances publiques a eu le privilège de toucher sa part des fameux « fonds communs ». Ce qui est également important si l’on sait que les impôts et taxes sont des biens du contribuable sénégalais.
La Constitution sénégalaise dit clairement dans son article 25 « Que les ressources naturelles appartiennent au Peuple. Elles sont utilisées pour l’amélioration de ses conditions de vie. » Dans le prochain référendum qui sera certainement soumis au peuple sénégalais par le nouveau régime il sera impératif d’ajouter un article qui stipule : « Les taxes et impôts sont des ressources fiscales qui appartiennent au peuple sénégalais. Nulle ne peut en faire usage sans une autorisation légale de l’Assemblée Nationale du Sénégal »
Il est clair et évident qu’avec une bonne carrière au sein des régies financières, en y rajoutant tous les avantages actuels, un fonctionnaire peut légalement être milliardaire. Surtout s’il a la chance d’être un jour Directeur des Domaines ou Directeur Général des Impôts et Domaines.
L’ancien Premier Ministre Amadou Ba a été accusé d’être milliardaire. Mais avec la déclaration récente du patrimoine du Président Bassirou Diomaye Faye, qui n’est pas loin du demi-milliard, on peut comprendre facilement qu’il devienne milliardaire avant ses 60 ans.
L’ancien Ministre de l’Economie et des Finances a eu à occuper le poste de Directeur des Domaines et Celui de DGID pendant plus de huit (8) ans avec un salaire de base de 5 millions de Francs CFA. Durant cette période, il a pu accumuler légalement (sans les avantages liés aux fonds communs) pas moins de 480 millions de Francs CFA. Plus que tout le patrimoine actuel du Président de la République Bassirou Diomaye Diakhar Faye. Je fais fi de ses postes avant qu’il ne soit nommé Directeur des Domaines et ceux qu’il a eu à occuper avant qu’il ne soit Premier Ministre.
Il se pose ainsi une question cruciale quant à l’équité dans la redistribution des recettes fiscales et de la gestion domaniale qui sont devenus des chasses gardées des régies financières. A ce jour l’Assemblée nationale n’a jamais voté une loi autorisant les régies financières à utiliser des recettes fiscales pour alimenter des « fonds communs » ni à s’attribuer des parcelles à chaque fois qu’une partie du domaine public est mise à la disposition des collectivités territoriales pour développer leur cadre de vie.
Il est a noté que le contribuable sénégalais n’a aucune information sur le nombre d’agents qui touchent à ces « fonds communs » et le coût annuel de ces « ponctions » sur le budget de l’Etat. S’ils ne figurent pas sur la Loi de Finance Rectificative (LFR), c’est que le budget n’est ni transparent, ni sincère.
Certainement si les coûts annuels de ces « fonds communs » étaient publiés légalement, la plupart des sénégalais allaient demander qu’ils soient tout bonnement supprimés. C’est peut-être l’une des raisons principales qui poussent les différents Ministres des Finances à faire l’omerta sur ces fameux « fonds communs ».
Il est donc important que le Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye et son Premier Ministre Ousmane Sonko de prendre des mesures idoines pour une meilleure transparence sur la question des « fonds communs » dans le cadre de la mise en œuvre du PROJET et du Jub Jubal Jubbanti.
Certes tous les sénégalais qui s’activent économiquement doivent obligatoirement s’acquitter de leurs taxes mais les agents des régies financières ne doivent aucunement être des prédateurs des ressources fiscales du peuple. Nous sommes tous d’égal dignité. Je suis d’avis que ces agents doivent être bien réénumérés avec une prime annuelle raisonnable et explicitement détaillée dans les rubriques du budget national. Le « Mothiate » de ces régies financières a des conséquences néfastes sur la résilience et la pérennité des entreprises nationales.
Enfin, pour donner tout son sens à la déclaration de patrimoine du Président, il serait impératif qu’il soumette ses biens et revenus trois (3) mois (90 jours) avant la fin de son mandat. Un quitus de bonne transparence lui serait remis par le Conseil Constitutionnel pour garantir le bon fonctionnement de l’Etat dans un esprit de transparence et de redevabilité sincère.
Cheikhou Oumar Sy
Ancien Parlementaire