Reportage: Ndimssiro, une île abandonnée mais riche de sa biodiversité
Ndimssiro, ce hameau de la commune de Fimela dans le département de Fatick, est une île riche de son environnement naturel classé. Elle est nichée dans les bolongs. Découverte
A moins d’une heure de pirogue de l’île de Diamniadio habitée par des sérères niominkas de la commune de Djirnda, dans le département de Foundiougne. Au départ de Fimela, le visiteur navigue un peu plus d’une heure trente (1h30) minutes de pirogue pour accéder à ce lieu qui était naguère occupé par des habitants à majorité qui s’adonnaient à l’exploitation des produits halieutiques dont les huitres, les arches, les murex, le symbium, le séchage des poissons, etc… Mais également ils pratiquaient la culture du mil et du riz. Par la suite, avec le développement et la modernisation de la pêche (pirogues motorisées, commercialisation), les communautés qui y vivaient commençaient à quitter les lieux pour venir s’installer à Fimela. D’ailleurs, c’est en 1985 que la dernière famille celle des Diamés, a eu à quitter les lieux. Mais, il faut noter cependant que des pêcheurs saisonniers s’y rendent toujours.
« Le site qui appartient à la lignée maternelle des Khalé Khalés, est envahi en partie actuellement par des espèces d’arbustes de Prosopis. Mais on y trouve toujours les canaris, les bassins de retenue d’eau et les piquets qui soutenaient les cases », nous fait savoir Daouda Kane, de la Coordination des actions pour la restauration des écosystèmes de Mangrove (CAREM). Une organisation qui y déroule des programmes de sauvegarde et de restauration de biodiversité. Mais, le visiteur qui s’y rend ne manque pas de découvrir aussi de gros baobabs et tant d’autres arbres sauvages.
Lamine Séne, qui fréquente les lieux à ses heures perdues pour une partie de pêche, ajoute aussi que, « l’île de Ndimsiro, souvent fréquentée pour des campagnes de cueillettes et de cultures, renferme plusieurs espèces d’animaux sauvages comme les hyènes, les chacals, les renards tachetés, entre autres en plus des variétés de poissons dans le bolong qui longe cette étendue de terre fertile qui est également entourée par d’autres hameaux ».
Pour joindre cette île abandonnée, il faut naviguer à bord d’une pirogue le long du bras de mer entouré d’une végétation de mangroves. Un trajet qui peut durer deux (2) heures de temps dont des pêcheurs et autres ramasseurs de fruits de mer sont maintenant habitués. Mais, aussi des touristes fréquentent souvent la zone en y installant un bivouac sur la plage et pouvoir y admirer le coucher du soleil et les étoiles pendant la nuit dans un concert de cris des hyènes et des chacals.
Le manque d’eau à l’origine de l’abandon
Rencontré à Fimela où il réside maintenant avec ses autres parents, Idrissa Diaham, qui est originaire de l’île nous raconte que, « les difficultés d’approvisionnement en eau potable sont la principale cause d’abandon de ce village de Ndimsiro. D’ailleurs, je peux vous révéler que nos pièces d’état civil portent le nom du village. Mais, il faut noter aussi que le manque d’infrastructures sociales de base a rendu invivable l’île de Ndimsiro. Et, comme vous le savez, en tant que jeunes nous n’avons pas le droit de rester inactif chez nous car seul le travail paye. A l’époque, nous étions à chaque fois obligés d’aller chercher de l’eau à Fimela et souvent au village voisin de Simal. Ce qui a fini pour nous décourager de ces longues corvées pour lesquelles, nos grands-pères, pères et mamans étaient toujours obligés de rester tout le temps au village. Et cela se répétait une voire deux fois dans la semaine. Pour dire que l’eau est cruciale et elle faisait vraiment défaut à l’époque à Ndimsiro ».
Cette situation avait fini d’installer le découragement total chez les habitants de l’île. « Il faut le reconnaitre nous en avions marre et c’est bien pourquoi on a fini par abandonner le village et rejoindre la localité de Fimela où il faut le souligner, chacune des familles avait une maison de résidence et à chaque fois qu’un des membres venait pour des besoins pouvait y loger le temps de son séjour », nous souligne Idrissa Diaham.
A l’ile de Ndimsiro, Idrissa Diaham nous fait savoir que, « les habitants s’adonnaient à l’époque ancienne à différents types d’activités. Dont, notamment : l’agriculture, la pêche, la cueillette des huîtres et autres mollusques, la transformation des produits halieutiques. Et dernièrement, avec notre époque, il y avait l’activité agricole, dont le mil et le sorgho mais également la riziculture. Ce qui faisait qu’on n’avait pas besoin d’aller acheter du riz ou autres céréales puisque les stocks étaient suffisants après chaque récolte ».
Le retour au terroir souhaité
Aujourd’hui, pour certains parmi ces autochtones de l’île, le retour au terroir est souvent exprimé. Mais, à une certaine condition que si certaines infrastructures y sont réalisées et un approvisionnement en eau assuré. Certains, selon M. Diaham, « penchent pour la réalisation d’un campement villageois pour recevoir des visiteurs ce qui constituerait une émulation pour les jeunes qui ne peuvent plus rester en l’état évasif. Il leur faut des activités à mener et des infrastructures de cette nature vont à coup sûr encourager ce retour de populations à Ndimsiro. Surtout que pendant chaque hivernage, certains y vont pour les cultures traditionnelles mais sont toujours obligés de revenir ».
Dans cette perspective selon Lamine Séne, « un projet de campement villageois avait été élaboré à l’époque par un petit groupe mais la mairie n’a pas facilité les procédures à cause de menaces venant des premiers occupants qui résident actuellement à Fimela. Ce projet aurait pu avoir un avantage comparatif du fait que, plus loin de cet endroit paradisiaque, se profile l’île de Diamniadio dans la commune de Djirnda non loin de Foundiougne, un autre endroit qui attire pour la beauté de ses paysages ». Mais, un retour aux sources peut déjà être envisagé dans le cadre du programme de désenclavement des iles du Saloum que le Président Macky Sall a lancé il y a quatre ans et qui a permis aujourd’hui à plusieurs îles d’être ravitaillées en eau potable et en énergie solaire.
Un endroit où il fait bon vivre
Pour dire, que les conditions sont réunies pour le repeuplement de ce bon coin très animé par les réalités de son environnement riche en mangroves et d’autres arbres pour la médecine traditionnelle dont par exemple le (Khewar) en plus des oiseaux migrateurs, les babouins, le bruit des poissons et le passage de certains pêcheurs ou touristes. « Ndimsiro est un endroit où il fait bon vivre. La situation s’est améliorée avec l’électrification de l’ile de Diamniadio située à près d’un kilomètre et où on peut s’y rendre à pied pour y effectuer des tractations financières et procéder à des achats de marchandises », informe Lamine Séne, originaire de Fimela.
Reportagne de Mohamadou Sagne (Correspondant à Fatick)