Karim Wade-Macky Sall : Au Grand Théâtre
Karim Wade est donc sur le chemin qui mène à la liberté et plus loin à la présidence. On a envie de dire, sans rire : « Tout ça pour ça !!!! ». Lorsqu’on se souvient de la violence de la curée contre l’ancien ministre des cieux et de la terre, censée justifier sa nécessaire inculpation et son inévitable incarcération, au motif que celles-ci répondaient à « une demande sociale », illustrée par ce vocable alors haineux de «Opération Gokhi », déclamé avec accent sonore marqué du sceau de la vindicte. On se souvient de la vulgarité qui avait présidé aux exhibitions de preuves de son forfait, allant fouiller jusqu’à la boîte à bijoux de sa défunte épouse. Il fallait lui faire rendre gorge. Tout ça sous le regard débonnaire du tout nouveau chef de l’état qui se réfugia derrière l’indépendance de la justice, pour que le procès soit et médiatisé et son issue impitoyable.
Aujourd’hui, les sénégalais s’interrogent. Si condamner Karim Wade était une demande sociale, pourquoi sa libération, par pure parallélisme des formes, ne répondrait pas à une exigence sociale ? Il est vrai que ces ressentiments de la population à l’égard de Karim Wade prenaient source dans le symbole qu’il avait incarné, imprégné de toute la suffisance et de l’arrogance qui avaient marqué le règne de son père Abdoulaye Wade. Ces ressentiments avaient été édulcorés par un autre sentiment, d’injustice celui-là, qui n’admettait pas qu’il fût le seul coupable, d’autant que si les 40 voleurs étaient à Rebeuss, Ali Baba était toujours à Versailles.
Le Président Macky Sall joue donc sa réélection à courte vue, sur une réconciliation avec son ancien parti, sous couvert de retrouvailles libérales. Quelle grandeur d’âme… On est touché par tant de grâces, c’est le cas de le dire. Et pour faire glisser la pilule, on convoque l’arme fatale du pouvoir religieux, lequel aurait recommandé, c’est entre les lignes de ce comportement gêné et gênant, d’être en adéquation avec ce mois béni de Ramadan, et d’exercer le pardon à celui qui était arrivé en 2000 en seconde classe au Sénégal et qui en était reparti 12 ans plus tard en Jet Privé.
« Super !!! » s’exclament les voleurs de poules et escrocs à la petite semaine, qui doivent se dire que tout est permis.
Du Grand Théâtre… On en rirait si ce n’était un tragique message envoyé à notre jeunesse, à laquelle on serine à tout bout de champ, l’importance des valeurs qui fondent notre société.