Macky Sall ou les charmes d’une «diplomatie tranquille»

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Le Sénégal est un pays bien particulier. Le dire est un euphémisme artistique. Nous excellons dans l’art de l’autoflagellation qui ressemble quelquefois à de la démence collective. Lorsque notre équipe nationale de football, par exemple, est engagée dans des joutes où il est question de faire front commun, d’affirmer notre identité et d’afficher nos capacités sportives pour démontrer à la face du Monde que nous pouvons nous aussi être les meilleurs, une solidarité instinctive s’extirpe de notre conscience nationale.

Pourtant, même pendant ces moments de communion spontanée, vous trouverez toujours, parmi nous, des « bienheureux » qui nagent à contre-courant et vont jusqu’à souhaiter méchamment l’hécatombe pour des raisons incongrues et irrationnelles. Il en est de même dans le domaine si délicat de la diplomatie.
Notre pays est un acteur assidu des plateaux de médiation en Afrique et dans le reste du Monde. Il y a eu par le passé quelques échecs qui n’enlèvent rien au mérite du Sénégal. Mais nous sommes surtout fiers légataires de moments historiques de réconciliations réussies entre parties en conflit. Sur ce tableau il faut inscrire les retrouvailles entre le Tchad et le Soudan, à travers Idriss Déby Itno et Mohamed El Béchir, leurs deux Chefs d’Etat réunis alors à Dakar ainsi que d’autres succès diplomatiques qui ont permis à beaucoup d’Humains de pousser un grand ouf de soulagement grâce au Sénégal et à sa diplomatie.
La médiation entreprise au Burkina Faso par le Président Macky Sall en tant que Président de la Commission de la CEDEAO, suite à l’odieux acte de tentative de prise en otage du pouvoir par le Général Diendéré, a été interprétée sous différents angles et avec les plus libres et diverses intentions par la classe politique sénégalaise d’abord mais aussi par une certaine presse au Burkina même. Si à Dakar les pourfendeurs (opposants politiques) des actes posés par le Président Sall ont déroulé l’habituel discours de rejet des initiatives de ce dernier et tenté de minimiser leur portée, certains analystes politiques sont, quant à eux ,passés complètement à côté du sujet par précipitation et envie de vendre la peau de l’ours avant d’avoir tué celui-ci. L’annonce au Sénégal, par certaines personnalités, de l’échec de la médiation du Président Sall, a certainement trouvé un écho dramatique, pour ces dernières, dans ce qui est arrivé vendredi dernier à l’issue du premier conseil des ministres réuni après le coup d’Etat manqué. En effet, sur décision de cette instance, le fameux RSP (Régiment de Sécurité Présidentielle) a été dissout. La transition a donc repris son cours avec Michel Kafando.
Que ce serait-il passer si Macky Sall ne s’était pas tout de suite rendu au Burkina, dès l’annonce du Coup d’Etat ? Beaucoup avaient d’ailleurs, dans la foulée, jugé son déplacement risqué, ce qui était du reste vrai !
Certains avaient fustigé l’accueil du Président Sall par le Général putschiste et les échanges officiels de civilités entretenus avec lui comme si Diendéré était subitement devenu un Chef d’Etat (légal et légitime). Oui, c’était troublant et le Président Sall n’avait pas l’air très enthousiasmé à sa descente d’avion, dans ce contexte presque surréel ou un usurpateur identifié avait osé rêver de manger à la table des démocrates en transgressant une des règles élémentaires qui régissent leur vie : conquérir le pouvoir par les urnes !
Les conditions du départ des putschistes et de la reprise de la transition, contenues dans un document soumis à l’attention des Chefs d’Etat réunis d’urgence à Abuja et qui suggérait une amnistie de Diendéré et de ses acolytes, n’étaient-elles pas un attrape-nigaud servi aux putschistes pour mieux les ferrer ? Pour les mettre en confiance afin d’éviter un bain de sang supplémentaire et des souffrances inutiles ? Beaucoup de questions peuvent surgir de cet instant de la médiation mais une chose est sûre : le Président Sall, pour avoir, dans l’urgence, calmé l’ardeur des putschistes et « endormi » les partisans de l’arrêt de la transition en attendant de faire jouer Abuja, a sauvé le Burkina où les envolées d’une presse pressée d’en finir avec les fidèles de l’ancien Président Compaoré et la bousculade aux strapontins des « nouveaux hommes » politiques, auguraient d’une descente aux enfers aux effets désastreux pour le pays et la sous-région.
Macky Sall est connu pour son calme légendaire. Au moment où se tient à New York la 70e Session de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies avec une forte participation du Sénégal, il est bien opportun de lui reconnaitre le mérite d’avoir aidé un membre de notre communauté, un pays frère, à vaincre les démons de la division et de l’immobilisme et à retrouver le chemin d’une construction nationale dans la paix et la sérénité. Le doute qui a nourri la réflexion et les jugements de certains Sénégalais et burkinabés, doit désormais céder la place à un standing ovation  pour le Président sénégalais. C’est ce qu’il mérite. Macky Sall est, peut-être aussi, le précurseur d’une nouvelle façon de faire en diplomatie et qui expliquerait le titre de cette contribution…

Souleyanta Ndiaye

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