»Certains chefs d’Etat ont facilement accepté les investisseurs étrangers » (présidente Enda)

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Des chefs d’Etat africains ont avalisé « facilement » la venue d’investisseurs étrangers dans le domaine agricole, permettant ainsi à ces derniers de s’accaparer de plusieurs terres du continent, accuse Mariam Sow, présidente d’Enda Tiers-monde.

« Ces chefs d’Etat qui acceptent si facilement la venue des investisseurs étrangers ont baissé les bras. Ils pensent que c’est la communauté internationale qui doit définir des modèles », soutient-elle dans un entretien paru sur le site Internet dédié à l’actualité africaine par l’hebdomadaire français Le Point.

« Pour justifier la venue des investisseurs étrangers, de nombreux gouvernements africains mettent en avant le besoin d’augmenter rapidement la productivité agricole pour faire face à l’explosion démographique qui s’annonce d’ici 2050…
Arrêtons de penser que c’est l’extérieur qui va faire nos affaires ! », insiste Mme Sow, par ailleurs coordonnatrice d’Enda Pronat (Protection de la nature).

« L’Afrique doit compter sur elle-même et pour une fois, profiter de ses richesses, participer de façon beaucoup plus digne aux grandes négociations mondiales. Je trouve dommage que ces chefs d’Etat africains qui ont connu les indépendances continuent à être obnubilés par des promesses financières qui n’aboutissent pas », déclare-t-elle.

« Après cinquante années de coopération, on nous parle aujourd’hui d’investissements. C’est trop facile. Des investissements. Mais quels investissements ? Pour qui, qu’est-ce que ça donne ? Dans nos pays, on a tellement cultivé la pauvreté, le sous-développement, que les gens ont perdu le contrôle, la capacité de se dire que c’est à nous de faire », fait-elle valoir.

« Certains sont prêts à bazarder leurs terres car il n’y a pas de politique agricole claire. Alors que l’on pourrait développer l’agriculture familiale. Au lieu de cela, les paysans délaissent l’agriculture. Ce sont ces mêmes paysans que l’on retrouve dans des pirogues pour aller en Europe. On les chasse de leurs terres et ensuite on leur dit non, l’Europe ce n’est pas pour vous. Ça fait mal », ajoute la présidente d’Enda Tiers-monde.

« La population va doubler en Afrique. Il faut bien évidemment travailler les terres ! Mais cela mérite une réflexion approfondie, par rapport aux besoins alimentaires, par rapport à l’emploi. Il s’agit de voir comment poser une vraie politique foncière et une politique agricole qui permettent de nourrir les Africains, de valoriser, transformer la production en milieu rural, de professionnaliser les filières agricoles », préconise Mariam Sow.

Parlant de l’exemple du Sénégal, elle affirme que les pouvoirs publics ont « pris la mesure du problème » et « compris que le pays doit produire pour nourrir sa propre population ». Elle rappelle que le gouvernement actuel « a pris l’engagement d’aller vers une réforme foncière » qui se matérialise déjà par une commission mise en place.

Selon Mme Sow, l’objectif de cette réforme foncière « est de donner un droit juridique aux communautés », si l’on sait que les populations locales « veulent que la gouvernance des terres soit entre leurs mains, pour pouvoir distribuer les terres, négocier éventuellement avec des investisseurs étrangers de façon transparente ».

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